6 septembre, 2016

Dianne Whelan: plus de 500 jours sur le Sentier

En juin dernier, la cinéaste Dianne Whelan pédalait sur le Sentier Transcanadien, près de Sainte-Anne-de-Madawaska, au Nouveau-Brunswick. Sur le rebord de son casque accroché au guidon de son vélo se tenait un petit oiseau affublé d’une huppe de plumes jaunes sur la tête. Il jetait parfois un coup d’œil vers le fond du casque, où Dianne lui avait installé un nid d’herbes et de pissenlits. Elle avait trouvé la petite créature comme morte sur le bord du chemin, mais quand elle l’avait délicatement prise dans sa main, elle avait senti battre son cœur. Après s’être baladé une heure avec Dianne Whelan, l’oiseau avait repris suffisamment de force pour prendre son envol.

 

Dianne Whelan a immortalisé la scène avec la caméra GoPRo installée sur son vélo. C’est exactement ce genre d’imprévus que nous réserve la «magie du quotidien» qu’elle veut filmer durant le périple de 23 000 km qu’elle prévoit faire à pied, à vélo, à ski, en raquette, en kayak et en canot sur le Sentier Transcanadien. Elle est partie de Saint-Jean de Terre-Neuve en 2015, le jour de la fête du Canada, et terminera son voyage en Colombie-Britannique. Elle partagera son expérience grâce à un documentaire et à un livre. Ils sont bien sûr très loin d’être achevés, mais elle sait qu’ils parleront d’art, d’histoire, d’écologie et d’état d’esprit.

 

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Crédit photo: Dianne Whelan

 

Partie depuis un an, Dianne Whelan n’a toujours pas fini de traverser le Québec, prouvant ainsi que le titre provisoire de son escapade, 500 jours dans la nature, sous-estimait largement l’ampleur de l’entreprise. «Cela montre à quel point ma mentalité a changé depuis le départ», dit-elle. Elle s’obligeait au début à suivre un calendrier très exigeant, mais a vite décidé de se débarrasser de cette contrainte et de vivre l’instant. «J’encourage quiconque veut suivre le Sentier à faire de même, conseille-t-elle, que ce soit pour un après-midi, une journée, une semaine, ou pour un voyage de fou comme le mien. Ce n’est pas une chose qui se conquiert, c’est une chose qui s’explore.»

 

À 51 ans, Dianne Whelan est en bonne santé et plutôt en forme, mais elle ne se voit pas comme une athlète. Ce dont on a vraiment besoin dans ce genre de voyage, continue-t-elle, c’est de souplesse mentale. Elle qui avait par exemple prévu au départ de faire beaucoup de vélo à Terre-Neuve a vite découvert que de longues portions du Sentier étaient recouvertes de pierres concassées datant de l’époque où le chemin servait de voie ferrée. «J’ai compris que j’allais devoir passer plus de temps à pousser mon vélo qu’à le monter, et je m’y suis résignée, dit-elle. Aussitôt que vous acceptez de genre de chose, vous n’éprouvez plus de frustration. C’est l’un des cadeaux de cette aventure : elle vous oblige à prendre les choses avec philosophie.

 

Pour Dianne Whelan, chaque journée commence sous la tente, à faire son café et à prendre des notes pour son bouquin. Tout au long de son périple, elle prend des films et des photos, parle aux gens qu’elle rencontre ou se régale d’un magnifique panorama. Elle communique aussi avec quelques amis et collaborateurs qui suivent son signal GPS, l’aident à régler les problèmes de logistique et, à l’occasion, viennent à sa rencontre faire des sauvegardes de ses séquences filmées et l’approvisionner en fournitures. «Quand j’ai commencé […], j’avais faim de solitude, je ne pensais qu’à ça, écrivait-elle dans son blogue en avril dernier. Mais par un jour de grand vent [dans le parc national de Fundy, au Nouveau-Brunswick], j’ai vu ces troncs d’arbres résister comme des rocs alors que leurs branches ployaient violemment et j’ai compris que c’était parce que, sous la surface, leurs racines s’enchevêtraient les unes dans les autres […] Aucun arbre ne reste debout seul. Nous non plus.»

 

Dianne Whelan dans le parc national Fundy

 

Avant de se consacrer au Sentier Transcanadien, Dianne Whelan a tourné des documentaires dans l’Arctique canadien et au camp de base de l’Everest. Comme beaucoup de créateurs canadiens avant elle, elle puise son inspiration dans la nature. Le ululement d’une chouette ou la lueur d’un jour qui se lève suscite aussitôt en elle une vision ou une impression qu’elle veut partager. «Vous êtes en phase avec un écosystème immense, vivant, confie-t-elle. Pas besoin d’être un intellectuel pour comprendre. Ça se fait tout simplement, intuitivement.»

 

Dianne Whelan a aussi croisé la route de gens qui l’ont inspirée, et beaucoup d’entre eux lui ont offert de l’aider, sur le plan matériel comme sur le plan moral. «J’ai été stupéfaite par l’ouverture des gens des communautés des Premières Nations dans lesquelles je me suis arrêtée et par les échanges que j’ai eus avec eux, note-t-elle. Même chose dans les communautés acadiennes et gaéliques, françaises du Québec et anglaises. Notre pays est peut-être une véritable mosaïque de cultures, mais il y a une chose qui reste invariable, c’est la gentillesse des gens.» Le symbolisme du Sentier Transcanadien la touche pour des raisons similaires : «En dépit de notre grande diversité, nous sommes tous connectés par cette terre.»

 

Pour montrer sa reconnaissance envers tous ceux qui ont œuvré à la création du Sentier Transcanadien, surtout des volontaires, Dianne Whelan aimerait offrir en retour quelque chose qui aura de la valeur. «J’en suis à l’âge où on n’a pas envie de passer des années à créer une œuvre d’art pour déprimer les gens, dit-elle. Je veux que ce que je leur offre leur donne satisfaction, que cela les inspire d’une certaine manière. C’est pour moi encore plus important que d’atteindre ma destination.

 

Pour lire le blogue de Dianne Whelan, rendez-vous sur 500daysinthewild.com.

Merci